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Il faudra bien reparler du cimetière

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Au conseil du 1er juillet, nous nous sommes étonnés que la question du cimetière ne soit pas abordée. Il y a urgence pourtant car le nouveau cimetière devrait être en service à la fin de l’année 2015 et les procédures sont longues, semées d’embûches juridiques. Il se dit ici et là ces jours-ci que la municipalité aurait trouvé quelques centaines de mètres carrés pour répondre aux besoins immédiats. Pourquoi pas ? Il faut traiter les questions d’urgence. Nous en saurons plus bientôt : à quel prix ? Acquisition amiable ou déclaration d’utilité publique et expropriation ?

Une promesse de campagne, peu raisonnable, peut-être imprudente

Que Mme Martin veuille tenir une promesse de campagne, nul ne s’en plaindra : tenir ses promesses, c’est rare en politique. Et déjà, elle a dû reculer sur son engagement de réduire les impôts de façon importante : une baisse minime sur une seule des taxes, pour un gain négligeable du côté des contribuables. Surtout que dans le même temps, elle a décidé d’augmenter le prix des repas aux restaurants scolaires, reprenant d’une main ce qu’elle avait donné de l’autre.

Mais pour le cimetière, croix de bois, croix de fer, elle va tenir son engagement. Pourtant, sachant que le dossier est complexe (eh oui, les dossiers communaux sont rarement simples, voyez la maison médicale, par exemple), elle aurait pu s’en tirer assez facilement en reportant la charge sur ses prédécesseurs, sur nous donc : le dossier est avancé, les études préalables ont montré la faisabilité, sur le plan technique, c’est pratiquement prêt, la commune a déjà engagé des dépenses (trop lourdes les dépenses, toujours le souligner !). Je suis sûr que les élus minoritaires que nous sommes aujourd’hui n’auraient protesté que pour la forme, parce qu’ils sont conscients de l’intérêt général.

Plus raisonnables – ou mieux informés – M. Guy Rouillard et ses colistiers avaient anticipé le revirement : « Nous ne sommes pas d’accord avec le choix pour le nouveau cimetière, mais c’est tellement avancé qu’il sera impossible d’y revenir. » Sage analyse, et reconnaissance implicite que notre choix était un choix d’avenir, un vrai choix stratégique pour la commune. Et aussi grande prudence : la création d’un nouveau cimetière est un chemin semé d’embûches et le travail mené jusque là avait déminé le terrain ; il suffisait de lancer la procédure d’utilité publique, bien préparée auparavant, et après, de dérouler les différentes phases du chantier.

Une commission, pour quoi faire ?

Mais non, Mme Martin avait promis ! Il fallait donc reprendre à zéro... Les conseils d’EADM, partenaire de la commune pour l’élaboration du projet, n’ont pas suffi pour la faire changer d’avis. Elle a quand même créé, au conseil du 22 avril, une commission cimetière, une grosse commission, pas moins de huit membres, neuf avec le maire membre de droit, de la majorité, tous, aucune place n’étant prévue pour les élus minoritaires. Avant d’accepter le mois suivant que notre collègue Régine Le Viavant puisse y participer. Sans qu’on sache si ça va servir à quoi que ce soit, puisque la commission ne s’est pas encore réunie. Pourtant, des contacts sont pris avec des propriétaires... Donc, si on comprend bien, la commission se réunira... quand tout sera décidé.

Un sujet sensible, propre à l’émotion

Les Bretons ont des rapports très particuliers avec la mort et les morts. En témoignent, outre l’Ankou et sa charrette grinçante, les légendes et croyances autour de la mort, des revenants : les lavandières de nuit, les danses macabres, les intersignes, etc. « La Légende de la Mort » d’Anatole Le Braz a toujours du succès et, tout récemment, est paru un ouvrage de Bernard Rio, intitulé « Voyage dans l’au-delà, Les Bretons et la mort. » (Ed Ouest-France). On comprend dès lors que le cimetière, lieu de recueillement, de souvenir, où peu à peu le deuil se fait de nos proches disparus, est un sujet sensible, qui déclenche des émotions fortes. Sujet facile aussi pour des démagogues de flatter ces émotions, ou même de les agiter en inventant de belles histoires à mourir debout : « le maire veut déplacer les morts de St-Michel vers le nouveau cimetière ! »

Question sensible, le cimetière l’était déjà au temps du Père Mulot qui mourut à Questembert le 12 mai 1749. Au cours de la mission qu’il menait, il avait prêché contre l’abus des inhumations dans les églises... et il avait demandé à être enterré dans le « nouveau » cimetière de St-Michel devant la porte de la Chapelle. Grâce à sa réputation de sainteté, son exemple fut plus efficace que sa parole : les tombes se groupèrent désormais autour de la sienne, et le lieu saint fut exclusivement réservé au culte. A Paris, quand fut ouvert, en 1904, le cimetière du Père Lachaise, les Parisiens rechignèrent d’abord à se faire enterrer hors de Paris. Il fallut le transfert des dépouilles d’Héloïse et Abélard, de La Fontaine et de Molière, et dans un quartier réputé populaire et pauvre pour que ça devienne très chic de se faire inhumer au Père Lachaise. Aujourd’hui encore, c’est très prisé : la concession de 30 ans coûte plus de 2500 € ! (Il n’en coûte que 700 € pour une concession identique dans les cimetières parisiens de Thiais ou de Pantin !)

Une approche plus moderne

Pourtant, au lieu de se crisper sur des représentations anciennes, il faut réfléchir à une approche plus contemporaine de la mort et de la relation avec nos défunts. Et peut-être observer la réalité d’aujourd’hui : le cimetière St-Michel est dans la ville elle-même, il est donc accessible à pied... pour les habitants du centre. Mais si vous habitez à Kermaté ou à Coet-Bihan, il y a fort à parier que vous vous y rendrez en voiture, en pestant contre le manque de stationnement la veille de la Toussaint quand vous arriverez avec vos pots de chrysanthème.

La plupart des villes aujourd’hui ont construit leur cimetière à l’écart et ils les ont conçus d’une façon différente : ce ne sont plus des alignements de tombes, séparés par des allées gravillonnées, mais des parcs ouverts et paysagers, qui réintègrent la mort à la nature et qui font évoluer la fonction symbolique du cimetière. « Celui-ci n’est plus un lieu de mémoire active, c’est-à-dire investi quotidiennement par des pratiques rituelles commémoratives telles qu’elles étaient dictées jadis par la religion des tombeaux. » (L’Archipel des morts, de Jean-Didier Urbain, éditions Payot, 2005).

Sur la butte de Célac, un beau projet

Un parc inséré dans un paysage de champs et de bois, ouvert sur le soleil couchant, mais gardant le contact visuel avec le clocher et des bâtiments de la ville. Lieu de passage, de rencontre entre les vivants et les morts. Tel était le projet sur lequel nous avons travaillé avec EADM, le cabinet spécialisé Campo et un groupe de réflexion composé d’élus de la majorité et de l’opposition. Rappelons que l’emplacement sur les collines de Célac est inscrit au PLU validé en 2006. Rappelons que les élus minoritaires de l’époque ont validé ce point, je vous garantis qu’à aucun moment, ils n’ont fait valoir une autre solution ! Et dans le groupe de réflexion, les débats ont toujours porté sur l’aménagement global et non pas sur l’emplacement.

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Jardin du souvenir, pour le recueillement et la sérénité

Le Cimetière et ses accès : avantages partagés

Loin de la ville ? Vérifiez : il n’y a guère plus d’un kilomètre et demi entre le site et le pied du clocher. Mais le projet du cimetière au Grand Célac s’inscrit aussi dans une réflexion d’urbanisme. La route du Sendoué est très fréquentée, très étroite, et l’urbanisation croissante va encore augmenter la circulation. Il devient nécessaire de penser à sécuriser la circulation des piétons et cyclistes, tout en forçant les automobilistes à ralentir. La passerelle récemment construite est une première étape de l’opération qui devra sans tarder s’étendre de l’entrée de la ville au site prévu pour le cimetière, les deux passages les plus dangereux. La Commune s’est rendue propriétaire d’une bande de terrains entre le Pont-à-Tan et l’entrée de la ville. Cela permettra assez facilement d’élargir la voie et de réaliser un cheminement doux séparé des flux automobiles. Des contacts avaient été établis avec le propriétaire pour faire la même chose à l’Ouest du ruisseau. Le projet ainsi dessiné permettait de sécuriser à la fois l’accès vers le cimetière et la circulation quotidienne de tous les usagers. Cimetière ou pas, les habitants de ces quartiers sauront rappeler la dangerosité de la route... Et il faudra bien leur répondre.

Pas de rafistolages à courte vue

Trouver les quelques centaines de mètres carrés qui donneront un peu de temps pour le nouveau projet, pourquoi pas ? S’imaginer que ce rafistolage répondra aux enjeux à long terme, c’est une grave erreur. Gagner un peu de temps soit, espérons que des vraies solutions seront recherchées, et que nous serons épargnés de tout épisode de forte mortalité (épidémie, canicule). Sinon, Mme Martin n’aura plus, en s’appuyant sur les pouvoirs de police du maire, qu’à prendre un arrêté municipal interdisant de mourir à Questembert.

Publié le lundi 4 août 2014, par Paul Paboeuf.

Messages

  • Eh bien on peut dire qu’on en reparle par l’intermédiaire de la presse (info du pays gallo).
    La commission mise en place à cet effet ne semble pas avoir été réunie.
    Je croyais que c’était par cet intermédiaire qu’on pouvait montrer notre investissement auprès de notre commune.
    Mais maintenant ce sont les correspondants de quartier (« qui jouent un rôle prépondérant dans la vie municipale »).
    Courage à eux car ils ne sont pas si nombreux pour aller rencontrer et discuter avec tous les foyers de Questembert.
    A ce jour, certains sont engagés à la mairie beaucoup plus activement qu’au moment de la campagne pour les municipales.
    Et n’oublions pas qu’ils ne représentent pas tous les Questembertois s’étant exprimés au mois de mars alors que la commission cimetière l’est au moins un peu plus.
    En attente d’être associés aux décisions de la mairie engagée en toute transparence !

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