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Faux-chômeurs, tire-au-flanc ?

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Les sondages le montrent : les Français sont désormais persuadés que les chômeurs sont responsables de leur situation, qu’il n’y a donc pas lieu de verser quelque indemnité que ce soit. D’autant que pour beaucoup de gens et même pour des économistes distingués, les indemnités sont trop élevées, ce qui aurait des effets pervers, installerait les chômeurs dans l’assistanat, au lieu de les inciter à accepter le travail qu’on leur propose.

Nous devons donc admettre qu’il y a en France trois millions de tire-au-flanc, de profiteurs du système, que dix pour cent de la population en âge de travailler sont des faineants à qui il est grand temps d’apprendre les réalités de la vie...

Pourtant, quels sont les faits ? D’abord, les chiffres du chômage : 2 712 000 demandeurs d’emploi recensés à la fin août 2005, soit 9,9 % de la population active. Face à ce chômage massif, il se dit couramment que trop d’offres d’emploi restent sans candidats. Les chiffres de ces offres d’emploi non satisfaites sont difficiles à établir ; ils oscillent entre 270 000 selon l’ANPE et 537 000 d’après l’enquête « Besoins en main-d’œuvre » de l’Unedic (chiffres de la fin 2004). Quand bien même toutes ces offres seraient couvertes, nous en serions à 2,2 ou 2,4 millions de chômeurs. Ce n’est donc pas la solution du problème. D’autant que ces emplois sont souvent peu attrayants (salaires faibles pour des conditions de travail difficiles) ou que l’on manque de travailleurs formés dans des domaines comme le bâtiment. Il ne faut pas négliger non plus que les chômeurs les plus éloignés de l’emploi cumulent souvent les difficultés : problèmes de santé, de transport, etc.

Quoi qu’il fasse, le chômeur a peu de chance de trouver un travail : à supposer que tous essaient de prendre les postes offerts, ils se trouveraient entre cinq et dix en concurrence par emploi. Je vous laisse penser à quel prix se ferait cette concurrence !

Les faits sont têtus, alors plutôt que de les accepter, nous préférons rechercher des boucs émissaires : le chômeur est tout désigné pour occuper ce rôle... à défaut d’occuper un emploi. Alors on stigmatise les faux-chômeurs, on prévoit de pénaliser les demandeurs d’emploi qui oseraient refuser des offres inadaptées.

C’est en effet plus commode de rejeter la faute sur la victime, plutôt que de reconnaître l’effet de politiques toujours en faveur des nantis. Comme l’écrivait Jean-Claude Guillebaud, dans l’hebdomadaire La Vie,

« on fait comme si les plus pauvres, les laissés-pour-compte étaient responsables du sous-emploi et de leur exclusion. »

Et qu’on ne vienne pas nous parler de lutter contre la misère : c’est de justice qu’il faut parler, pas de charité.

Publié le mardi 18 octobre 2005, par Paul Paboeuf.

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