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Après les retraites, ils vont s’attaquer à l’APA

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Vous avez aimé la réforme des retraites (ce n’est pas fini), vous allez adorer ce qui se mijote dans les cabinets gouvernementaux : la réforme de l’APA (Allocation Personnalisée d’Autonomie) qui a été créée par le gouvernement Jospin et qui est versée aux personnes âgées en fonction de leur dépendance.

Le désengagement de l’Etat dans l’APA

L’Allocation Personnalisée d’Autonomie (APA) avait été créée par le gouvernement Jospin pour remplacer la Prestation Spécifique Dépendance votée en 1996 (Juppé). La PSD souffrait de plusieurs défauts : inégalitaire parce que fixée au niveau départemental, insuffisante parce que sans rapport avec la vraie dépendance, et très incomplète puisque peu de personnes pouvaient être concernées. La nouvelle allocation se voulait égalitaire (fixée au niveau national), mieux adaptée aux besoins réels (évaluation de la dépendance selon la grille AGGIR) et plus vaste puisque concernant à l’origine 800 000 personnes, alors que la PSD n’était accordée qu’à 135000 bénéficiaires.

En décidant de cette nouvelle allocation, le gouvernement Jospin prévoit une dotation aux départements pour compléter les ressources qu’ils affectaient à la PSD. Cette dotation est financée par une augmentation de la CSG et une contribution de la Sécurité Sociale. Mais ce partage « égalitaire » de l’origine n’a pas duré, parce que, à mesure que le nombre de bénéficiaires de l’APA a progressé, l’Etat s’est peu à peu désengagé. En 2002, sur un total de 1,85 milliard, la part de l’Etat représentait 43 % de la dépense pour 600000 bénéficiaires ; en 2010, l’Etat ne paiera plus que 29% d’une dépense totale de 5,4 milliards. Avec le RMI/RSA, la progression des dépenses imposées pour l’APA, progression non compensée par l’Etat, est une des causes des difficultés financières des départements.

Un cinquième risque : la dépendance

Après l’expérimentation en 2002, la logique était de consolider le dispositif et son financement. C’est ce qu’on a appelé la couverture du cinquième risque de la Sécurité Sociale, à côté des la maladie, de la famille, des accidents du travail et des retraites. Ce cinquième risque est également nommé le « risque dépendance » ou le « risque perte d’autonomie ».

Poser la question ainsi, c’est, en continuité avec le choix du département Jospin, mais aussi en remontant plus loin avec l’esprit du Conseil National de la Résistance, affirmer que la solidarité nationale doit s’exercer face au risque de perte d’autonomie, à condition de financer sur l’ensemble des revenus, comme la CSG et non pas sur le travail.

Ce n’est pas dans cette direction que s’oriente le gouvernement, malgré ce que Sarkozy avait annoncé dans la campagne de 2007 (mais il avait aussi promis de ne pas toucher à l’âge de la retraite !)
La première piste explorée est de rendre obligatoire à partir de 50 ans une assurance privée contre le risque dépendance... (pour le groupe Malakoff-Médéric de Guillaume Sarkozy ?)
Ce serait une fois de plus accroître les inégalités : les plus modestes n’ont pas les moyens de se payer une assurance complémentaire. On le voit dès maintenant : faute de moyens, ils renoncent à se faire soigner parce qu’ils n’ont pas de complémentaire santé. L’autre hypothèse n’est pas plus favorable : dans un premier temps, l’APA serait réservée aux personnes âgées les plus dépendantes et les plus démunies, avant d’être remplacée par les assurances privées. D’autre part, la « reprise sur succession » plafonnée cependant à 20000 Euros s’imposerait à ceux dont le patrimoine est supérieur à 100000 Euros comme condition d’une APA à taux plein. Cela s’appliquerait à plus de moitiés des personnes âgées dépendantes.

Encore plus d’inégalités

Il s’agit clairement d’un moyen de réduire les dépenses d’APA. Alors que la justice sociale voudrait que les prestations sociales soient universelles. Notons aussi que la reprise sur les successions supérieures à 100000 Euros, du fait du plafond à 20000 euros, toucherait les patrimoines faibles ou moyens... Que voudrait dire ce chiffre pour le patrimoine de Mme Bettencourt, par exemple ?

Publié le dimanche 24 octobre 2010, par Paul Paboeuf.




Post-scriptum

Dépenses de santé : la sécurité sociale coûte cher ? Selon l’OCDE, en 2006, cela représentait en France 11,1% du PIB pour soigner tout le monde de façon (presque) égalitaire. Aux Etats-Unis, les dépenses de santé représentaient 15,3% du PIB... mais en 2009, 80 millions d’Américains sur une population totale de 305 millions d’habitants étaient sous-couverts ou bien n’avaient pas d’assurance santé du tout pour 47 millions d’entre eux.

Messages

  • après les retraites, l’APA, et ensuite la sécurité sociale, l’assurance maladie

    le mal est déjà fait en partie : combien de gens ont déjà renoncé à se faie soigner les dents, à se payer des lunettes.

    il est temps de réagir

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  • Je vous l’avais bien dit

    Ce soir à la télé, le président l’a annoncé

    « C’est un engagement : après avoir réformé les retraites et garanti le revenu des retraités, je souhaite que nous réformions la dépendance », a-t-il déclaré.

    - il a réformé les retraites, on a vu comment !
    - il a garanti le revenu des retraités, si on pouvait croire ça
    - il veut « réformer la dépendance », craignons le pire

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    • « Je créerai une cinquième branche de la protection sociale [...] Je veux que la France soit un modèle dans la prise en charge des personnes âgées et dépendantes. L’honneur d’une civilisation, c’est la manière dont elle s’occupe des plus fragiles d’entre nous[...] Le rôle de la solidarité, c’est la prise en charge matérielle des personnes dépendantes. Le rôle des familles, c’est leur prise en charge affective ... »

      Nicolas Sarkozy (campagne présidentielle de 2007)

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    • Il était sincère lors de sa campagne présidentielle. Il l’est également aujourd’hui ! Combien de petits propriétaires vont être dans l’obligation de vendre leur bien pour être pris en charge ? On parle de succession, quelles succesions ? Les enfants qui n’auront pas les moyens de financer un placement pour leurs parents vendront la maison ? Quel projet pour l’avenir ?
      Les politiques doivent se pencher sérieusement sur ce sujet.

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  • Le candidat avait annoncé lors de la campagne présidentielle la prise en charge de la dépendance : 5ème risque de la Sécurité Sociale.

    Alors que l’on s’attendait à un projet ambitieux sur un support de solidarité nationale, on nous propose de souscrire une assurance privée de façon obligatoire à partir de 50 ans. De plus on nous annonce la suppression de l’APA en période transitoire. Quel recul !!!

    Comment vont faire les milliers de personnes de plus de 50 ans qui vivent en dessous du seuil de pauvreté ?

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    • Apres la discrimination positive, voilà la discrimination négative, en fonction de l’âge

      La question que pose l’UMP est simple : la collectivité nationale doit-elle aider les personnes âgées, qui ne travaillent plus, ne produisent plus, après 67 ans ... et dont l’espérance de vie est réduite ?

      La façon dont le constat est fait, est, malgré un enrobage plus convenable, odieux dans son principe.

      Rien de plus émouvant que d’écouter un ancien égrainer des souvenirs, si lointains, si enfouis, qui font monter une boule d’infinie tendresse au fond de la gorge.

      Ces gens me font penser à une autre chanson du grand Jacques :

      « Faut vous dire Monsieur
      Que chez ces gens-là
      On ne cause pas Monsieur
      On ne cause pas on compte. »

      Voir en ligne : Les Vieux

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  • Ma mère est atteinte de la maladie d’Alzheimer , elle est dans un centre gériatrique spécialisé. Malgré une assurance dépendance (environ 390€) , sans l’APA ses revenus sont insuffisants pour régler l’établissement.

    Je fais remarquer qu’elle n’était jamais malade et qu’elle n’a fréquent les hôpitaux que pour des accouchements ... En retraite à 65 ans, elle a cotisé durant toute sa vie professionnelle.

    Pourquoi devrait elle être privée de la prise en charge de ses soins au moment où, pour la première fois de son existence, elle en avait le plus besoin ?

    Pourquoi la priver de la manifestation de la solidarité nationale alors qu’elle même avait respecté et honoré ce pacte républicain d’un bout à l’autre de sa vie de citoyenne ?

    Ça n’était pas un cadeau, mais une dette remboursée, le juste retour transgénérationnel de la manifestation de la solidarité nationale.

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    • Une fois de plus on va assister à la marchandisation + ou - rampante de la santé.

      La dépendance est une pathologie et, à ce titre, l’on peut se se demander pourquoi celle-ci ne serait pas prise en charge par la sécurité sociale et qu’elle serait couverte par une assurance privée.

      Il s’agit encore une fois de préparer l’opinion au « détricottage » de la solidarité nationale et une soumission à une idéologie libérale.

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    • Cela ne fait que confirmer les propos d’Eric Besson (avant sa trahison) : « Sarkozy, c’est la filiale française de la Bush Cie ».

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    • En cas de passage au privé, que l’on peut au minimum soupçonner, les assurances accepteront elles de couvrir ce risque pour des demandeurs ayant la moindre maladie chronique ?
      Les assurances ne seront elles pas libres au nom du libéralisme de refuser cette garantie et de faire des sélections ? de moduler les tarifs et de les réviser en cours de contrat ?

      Chacun sait que nombre de personnes âgées aident leurs enfants et petits enfants en précarité et qu’il y a un tassement du niveau des retraites ... au moins pour certains !

      Avec la suppression programmée de l’APA, une étape supplémentaire risque d’être franchie pour affaiblir la situation des personnes âgées et des classes moyennes.
      Le retrait de cette allocation universelle sonnera le glas de la solidarité nationale..

      J’entends déjà le « bonni-menteur » de l’Elysée affirmer qu’avec la crise, on n’a pas le choix !

      On a toujours le choix : le tout est plutôt de savoir à quoi on donne le plus d’importance : est-ce à la baisse de la TVA dans la restauration ou à la prise en charge des personnes âgées et handicapées ?

      C’est un choix de société.

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    • Je précise que l’APA, permet aussi indirectement de subventionner les emplois de proximité, qui se fait aussi par le dégrèvement fiscal profitant surtout aux revenus les plus élevés.

      Soutenir l’APA, et donc les emplois qui en découlent, a donc plus effet sur le plan économique (si précieux à nos libéraux !) que la baisse de TVA peut créatrice d’emploi selon la Cour des Comptes.

      C’est donc bien un choix !

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    • Il me semble que tout est dit en filigrane dans les différents commentaires : pour le Gouvernement, sous le couvert de réforme ou de renflouer le déficit, il s’agit de ponctionner les plus faibles et en particulier dans ce cas de s’en PRENDRE AU PETIT PATRIMOINE DES PERSONNES AGEES ET MALADES

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  • Avez-vous entendu les « messages » du gouvernement diffusé à la radio ?

    Ça commence par un voix jeune marquée par l’angoisse :« avant de commencer à travailler, j’ai été un an et demi au chômage »

    Puis vient, accompagnée d’une musique sirupeuse, une voix féminine rassurante, quasi maternelle : « grâce à la réforme des retraites, bla bla... »

    Pour vérifier, écoutez sur le site officiel

    et il y en a 4 comme ça, aussi débiles

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  • Sarkozy concède que la réforme des retraites, c’est “travailler deux ans de plus sans gagner plus”

    Retour aux fondamentaux de 2007 sur le travail. En déplacement dans l’Eure, pour faire une visite de l’usine de moteurs Safran-Snecma, Nicolas Sarkozy a vanté sa politique industrielle, réitéré son crédo en faveur des usines....

    Pour finir, le chef de l’Etat a défendu la réforme des retraites. « Naturellement que la réforme est douloureuse, qui peut le contester ? Elle consistera à l’horizon 2018 à ce qu’on ait travaillé deux ans de plus sans gagner plus ». Un lointain écho au « travailler plus pour gagner plus » de 2007, revisité par la crise ?

    Lire le blog d’Arnaud Leparmentier, journaliste au Monde

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  • Ouest-Fance du 4 janvier

    Le casse-tête du financement de la dépendance

    L’article mérite d’être lu et vous le trouverez ici mais insidieusement, il laisse entendre que le financement public de la dépendance est impossible : « L’Etat et les Départements auront du mal à financer seuls...Plusieurs pistes sont avancées par le rapport Rosso-Debord. Obligation de prendre une assurance dépendance dès 50 ans. »

    Quelle différence y a-t-il entre le financement public et une assurance dépendance ? Dans les deux cas, les ressources sont prises sur la richesse produite, mais dans un cas, il y a une égalité possible de traitement des bénéficiaires et un financement par des cotisations liées à la capacité contributive (plus vous gagnez, plus vous payez) et dans l’autre cas, ceux qui peuvent payer s’offrent des garanties, ceux qui ne peuvent pas crèvent la gueule ouverte.

    On dit quelquefois que la retraite c’est le patrimoine de ceux qui n’en ont pas. Pourquoi ne pas mettre dans ce patrimoine, le droit à une fin de vie dans la dignité ?

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